assurance professionnelle

Demande de contre-expertise suite à un sinistre: qui paie?

Vous n'êtes pas d'accord avec les conclusions de l'expert envoyé par votre assureur? Vous exigez une contre-expertise: qui en supporte les frais?


C'est l'histoire d'un mec qui a subi un sinistre (aïe, ça commence mal): un dégât des eaux dans l'entrepôt et c'est 4 mois de travail qui partent en jus de carton. Ce patron d'une TPE qui commercialise des emballages recyclables, s'en serait bien passé.

Son assureur, qu'il aura pris le soin de prévenir dans les délais, lui envoie un expert, car la nature et "gravité" présumée des pertes le justifient. Autant on envoie rarement un expert pour une vitre fissurée dans un débarras, autant quand il s'agit de dizaines de milliers d'euros de stock et d'une perte d'exploitation, là il y a besoin de discuter et de faire des vérifications.

Cet expert, qui rapporte donc à mon mandant l'assureur, est chargé de constater, pendant sa ou ses visites d'expertise, la cause et les conséquences du sinistre. Mais également de déterminer les responsabilités éventuelles à rechercher. Et enfin de réaliser un chiffrage des pertes; en vue de déterminer les sommes qui seront versées en indemnisation à notre pauvre patron sinistré. L'expert remet à l'assureur un rapport complet, sur la base duquel l'assuré reçoit alors une proposition de prise en charge de son sinistre.

Sauf que... notre patron n'est pas du tout d'accord avec les conclusions de l'expert! Et il aimerait tout reprendre de zéro en faisant appel à un second expert pour contre-expertiser le chiffrage qu'il estime être largement sous-estimé.

Cette situation vous parle?

Et surtout: à qui appartient-il de payer, si vous demandez une nouvelle expertise?

AEA vous explique les astuces pour faire entendre votre désaccord.

Un assuré sinistré a-t-il le droit de demander le rapport de l'expert de sa compagnie d'assurance?

 
On vous l'accorde: il n'est pas toujours facile de savoir ce qu'un expert note dans son carnet ou sur sa tablette, pendant qu'il fait sa visite.
 
Il pose beaucoup de questions:
- parfois qui n'ont rien à voir avec le sinistre (quoi la superficie des bureaux? on parle d'un dégât des eaux dans l'entrepôt, là!)
- parfois dont la réponse paraît évidente, mais il la pose quand même ("Vous produisez des emballages recyclables... et vous stockez tout ici?")
 
En même temps qu'il prend autant d'informations que possible concernant le sinistre, pour déterminer précisément les circonstances de l'incident; il en profite aussi pour vérifier que toutes les déclarations de l'assuré, listées dans le contrat, sont justes et conformes à la réalité. Et cela, MÊME SI ces déclarations n'ont strictement rien à voir avec le fameux sinistre.
 
Pourquoi ces vérifications?
En cas d'information non exacte, cela permet à la compagnie d'assurance dans certains cas, d'appliquer une "règle proportionnelle", ou une pénalité sur le montant d'indemnité à verser au sinistré.
Par exemple: 
- si l'assuré a mal déclaré la superficie totale de son entrepôt et qu'il manque 40 m2 par rapport à la réalité (disons l'équivalent de 20% de la superficie totale), la compagnie pourra réduire proportionnellement l'indemnité à verser pour le sinistre (soit 20% en moins).
 
Bref... 
L'expert de la compagnie prend donc en note tout un tas d'informations, qu'il transmettra à la compagnie dans son rapport. Ces informations et ce rapport ne sont pas tenus à disposition de l'assuré. 
Si l'assuré émet une demande à la compagnie, pour obtenir une copie du rapport de l'expert, il est fort à parier que sa demande sera refusée. Ce refus est généralement motivé par le fait que l'expert est strictement mandaté par la compagnie et lui rapporte exclusivement.
Il faut savoir que ces rapports doivent obligatoirement être remis sur demande à l'assuré dans le cas de sinistres auto ou dommage-ouvrage.
Dans le cadre d'une assurance IARD (dommages matériels et immobiliers: assurance habitation, assurance professionnelle multirisque...), il faudra insister et envoyer des lettres recommandées. Votre demande est recevable et légitime, surtout si le rapport de l'expert sert de preuve à un refus d'indemnisation de la part de la compagnie. Selon le code civil (article 1353): "[...] celui qui se prétend libéré [d'une obligation] doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation." 
 
 

Comment faire entendre mon désaccord? Et comment accéder aux détails de mon dossier?

 

La meilleure des solutions, en tant que sinistré, est de rapidement faire appel (dès que possible, si ce n'est dès la survenance du sinistre) à son propre expert indépendant, qui sera en charge de défendre exclusivement les intérêts de son client sinistré.

La méthode la plus efficace pour faire entendre ses droits, c'est de provoquer une expertise contradictoire entre 2 experts: l'un qui représente la compagnie d'assurance et l'autre qui représente le sinistré.

Le terme "contradictoire" ne veut pas dire que les 2 experts vont forcément être en désaccord et se taper dessus - comme le voudrait l'imaginaire collectif :-). "Contradictoire" signifie que chaque partie peut apporter à l'expertise ses propres arguments, estimations, conclusions: soit en menant une opération commune, soit en confrontant des points de vue différents. Le but étant de se mettre d'accord sur un mode d'indemnisation qui conviennent à tous.

Si aucun accord n'est trouvé, il est possible de faire appel à un 3ème expert! Ce 3ème intervenant, indépendant des 2 premiers, sera chargé de livrer ses propres conclusions pour démêler le dossier. Il est choisi ou invalidé conjointement par les 2 parties.

Il est même possible de porter l'affaire devant les tribunaux, auquel cas un expert judiciaire est nommé pour reprendre les évaluations nécessaires.

 

Chaque expert dûment nommé par l'une ou l'autre partie a accès aux éléments qui constituent le dossier, et a notamment l'occasion de se prononcer sur chaque détail de l'indemnisation qu'il estime nécessaire. Ses estimations peuvent s'appuyer sur sa propre vision économique des réparations (on dit alors que le chiffrage des pertes se faire "à dire d'expert"). Soit il argumente le chiffrage avec des devis d'entreprises, rapports de diagnostic, bureaux étude...etc. à l'appui.

L'expert de l'assuré peut donc tenir au courant l'assuré de tous les débats et chiffrages qui sont discutés entre experts ou avec la compagnie; cela permet plus de transparence pour le sinistré, et de faire la lumière sur la manière dont la résolution de son dossier avance.

 

Et ensuite? Qui paie la facture?

 

L'expert qui intervient pour la compagnie d'assurance est mandaté et payé exclusivement par la compagnie. Le sinistré ne paie aucune somme d'argent pour son intervention (qu'il intervienne 1 ou plusieurs fois), en aucun cas. 

L'expert qui intervient pour l'assuré est mandaté et payé par l'assuré. Ses honoraires sont définis bien en amont, avant même que la mission soit acceptée: il se rémunère généralement au forfait (un montant fixe par sinistre) ou en pourcentage de l'indemnité versée par l'assureur, plus rarement au forfait horaire. 

Certains contrats d'assurance prévoient de rembourser à l'assuré une partie des honoraires de son propre expert d'assuré. Cette prise en charge est généralement plafonnée, et peut varier selon les compagnies de 0 à 5%, beaucoup plus rarement aux frais réels engagés. L'assiette de l'indemnité est parfois aussi limitée (par exemple: 2,5% du dommage direct / ou 1,5% de la valeur du bâtiment etc.). Il existe un barême "UPEMEIC" (tenu par le syndicat de la profession d'expert d'assuré) sur lequel plusieurs compagnies adossent leur garantie "honoraires d'expert" et qui fonctionne par paliers (plus d'infos sur le site de l'UPEMEIC).

Dans certains cas, donc, il peut arriver que l'intervention de l'expert d'assuré soit totalement prise en charge par l'assureur.  Dans d'autres, il va rester une somme à débourser par l'assuré. Mais dans la grande majorité des sinistres, l'indemnisation globale de l'assuré se retrouve être maximisée grâce à l'intervention de l'expert d'assuré.

Le 3ème expert qui peut être nommé par les 2 parties lorsque le dossier doit être départagé, est payé conjointement par les 2 parties en jeu, c'est-à-dire l'assuré et la compagnie pour moitié chacun. 

Enfin, dans le cas où un expert judiciaire est nommé lors d'une procédure portée devant les tribunaux, c'est alors au juge de déterminer la partie qui prendra en charge ses honoraires, à l'issue du procès. Le recours à un expert judiciaire ne dispense d'ailleurs pas chaque partie de régler les honoraires de ses éventuels propres experts qui seraient intervenus en début de dossier.

 

A quel moment faut-il réclamer une contre-expertise?

L'expert de la compagnie est en généralement nommé lorsque la compagnie a du mal à cerner les circonstances de la survenue d'un sinistre; ou à partir d'un certain montant de pertes réclamé par le sinistré. Il est courant qu'un sinistre soit réglé sans que la compagnie ait besoin de missionner un expert (il s'agira alors de sinistres de petite envergure).

L'expert de l'assuré peut être mandaté à tout moment, tant que l'assuré n'a pas accepté les conditions d'indemnisation proposées par la compagnie, ou tant que la compagnie fait un refus de prise en charge qui n'est pas justifié aux yeux de l'assuré. Mais, pour obtenir les meilleurs résultats possibles, le plus tôt il est nommé, le mieux il pourra représenter son client à toutes les étapes clés du déroulement des expertises.

Pour en savoir plus sur les délais que les assureurs sont tenus de respecter, pour indemniser leurs assurés, voici un article AEA qui détaille les obligations des compagnies et des sinistrés.

Pour une assistance gratuite par téléphone, nos experts répondent à vos questions:

Obtenir 30 min de conseils gratuits


Pour en savoir plus sur comment optimiser ses contrats d’assurance professionnelle à La Réunion, consultez notre page dédiée à l'optimisation de vos contrats professionnels à La Réunion, ou téléchargez directement notre guide.

CTA LB1 Assurances pro téléchargement guide

Vous aimerez également...

On vous alerte dès qu'un nouvel article est publié

Vous ne voulez rien laisser passer? Laissez-nous votre adresse email par ici: